Bioterrorisme, l'état d'alerte
EAN13
9782841874521
ISBN
978-2-84187-452-1
Éditeur
Archipel
Date de publication
Collection
Roman français
Nombre de pages
360
Dimensions
10 x 10 x 2 cm
Poids
100 g
Langue
français
Code dewey
303.625
Fiches UNIMARC
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Bioterrorisme, l'état d'alerte

De

Archipel

Roman français

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eISBN 978-2-8098-1529-0

Copyright © L'Archipel, 2003.

« C'est le bruit de quatorze mille avions progressant à découvert... Mais dans le Kurfurstendamm et le XVIIIearrondissement, l'explosion des bombes d'anthrax fait à peine plus de bruit que l'éclatement d'un sac en papier. »

Aldous Huxley, Le Meilleur des mondes (1932).

Préface

C'est un lieu commun de dire que la science et la technologie ont révolutionné la manière de vivre et de penser d'une grande partie de l'humanité. Cela l'est moins de constater que, comparée au rythme d'évolution de l'humanité, cette révolution fut brutale. Elle n'occupe que l'espace de six ou sept générations. Ce n'est qu'au début du XXe siècle que le développement scientifique du XVIIIe siècle et celui des technologies industrielles au siècle suivant, commencent à avoir un impact important sur la manière de vivre et de penser. Dans le développement des civilisations, on observe ainsi une discontinuité brutale entre 1850 et 1950, dont on peut mesurer l'importance en retraçant l'évolution au cours des siècles des deux plus vieux métiers du monde : celui de paysan et celui de soldat. Il existe en effet un parallélisme frappant entre le développement des techniques agricoles et celui des techniques de combat.

Les techniques utilisées par les guerriers et les paysans n'ont évolué que très lentement au cours de l'Histoire. Certes, les canons avaient une portée un peu plus longue, et les boulets une efficacité supérieure à celle des balistes. Mais la portée des Chassepot du général Galifet était comparable à celle des arcs de Crécy, des arbalètes de Bouvine ou des arquebuses de Marignan. En 1870, les armées française et allemande se battirent avec des engins peu différents de ceux qu'utilisait Napoléon Ier. La charge des cuirassiers de Rechauffen était la reproduction, à quelques détails près, de celle de la chevalerie française à Azincourt. À la même époque, dans nos champs, on moissonnait encore à la faucille et l'ère des moulins à vent n'était pas encore révolue. Le battage du blé se faisait au fléau, comme au temps des Gaulois. Pas d'engrais artificiel, mais le solide et odorant fumier, si cher aux paysans du Moyen Âge. Pour labourer les terres, rien ne valait une ou plusieurs paires de bœufs attelés sous le joug, parfois à des charrues à soc, plus souvent à des araires.

La « révolution industrielle » survient au milieu du XIXe siècle. Immédiatement, l'art de la guerre et l'agriculture se transforment à une cadence très rapide. À l'apparition, dans les champs des faucheuses et des batteuses correspond l'arrivée de la mitrailleuse sur les champs de bataille, à celle du tracteur agricole, l'apparition du char de combat, à celle des engrais, la naissance de la dynamite. Avec l'irruption des insecticides, vient l'utilisation des gaz de combat. Enfin, au surgissement des plantes et des animaux génétiquement modifiés, correspond aujourd'hui la menace d'une guerre biologique d'un genre nouveau...

D'où cette interrogation : comment le développement permanent des « armes nouvelles », c'est-à-dire des armes nucléaires, chimiques et biologiques, en modifie-t-il l'emploi, que ce soit dans de « nouveaux types de guerres » entre États, ou plus généralement dans celui de l'usage de la violence ?

Observons tout d'abord que ce développement a eu raison du vieux métier de soldat, comme du vieux métier d'agriculteur. Tuant « mieux », les guerriers sont plus compétents, plus techniques, mais aussi moins nombreux. Dans le domaine de la guerre, et plus généralement dans celui de la violence sociale, l'évolution rapide des technologies a les conséquences les plus graves. Bombe atomique aidant, la guerre froide fut, pour le monde occidental, la forme ultime des guerres nationales entre pays riches. Il n'est pas certain, en revanche, que ce soit la forme ultime des guerres qui pourraient opposer le monde riche au monde pauvre... La prolifération des armements nucléaires est pour l'Occident une menace encore lointaine, mais parfaitement réelle. Si l'imam Khomeyni avait pu disposer d'armes nucléaires, il les aurait probablement employées contre l'Irak, voire contre les États-Unis, en utilisant un avion banalisé. Si les tensions entre le Pakistan et l'Inde nous sollicitent tant, c'est bien parce que les deux belligérants disposent d'un armement nucléaire. À l'avenir, il n'est pas sûr que la sagesse qui prévalut, pour des raisons économiques, entre les Soviétiques et les Occidentaux, s'imposera à des États réputés « proliférants » ! Ce raisonnement explique, en principe, la (re)montée des tensions contre l'Irak depuis 2001.

Dès 1960, les Occidentaux s'étaient protégés contre le risque de prolifération nucléaire par le traité de Vienne, visant à contrôler les transferts de technologies nucléaires susceptibles d'accélérer la réalité de cette menace. Ce n'est plus le seul danger pris en compte par les traités internationaux. Désormais, sont également soumis aux contrôles des grandes nations les technologies de propulsion, de détection, de guidage des missiles, ainsi que les technologies de transmission, de chiffrement, de fabrication des moteurs de puissance, des réacteurs aéronautiques, ainsi que les techniques de fabrication d'une grande quantité de produits chimiques et biologiques. Parallèlement au développement des sciences et des techniques, ce genre de traité a été étendu à toutes les techniques dites de « double usage », à la fois civil et militaire. Et la liberté de nos vieilles universités est désormais sous surveillance ! En la matière, l'Europe et les États-Unis ne font d'ailleurs que suivre l'exemple des Byzantins, qui protégeaient sévèrement le secret du feu grégeois.

La seconde conséquence de la révolution scientifique et technologique dans le domaine de la guerre est la diminution du nombre de combattants nécessaires pour obtenir des nuisances graves et à grande échelle. Les nouvelles techniques permettent aujourd'hui à des groupes d'hommes de moins en moins nombreux d'acquérir des capacités de nuisance de plus en plus importantes dans des sociétés de plus en plus fragiles. Il n'est pas fortuit que le terrorisme se soit imposé comme forme de combat à l'heure où les technologies d'armement ont abouti à des techniques permettant à de petits groupes d'homme de réaliser des actions violentes de grande ampleur. Aujourd'hui, quelques hommes possédant des toxiques de guerre peuvent tuer en quelques minutes des centaines de voyageurs dans les couloirs du métro de Tokyo... Cet accroissement du potentiel de nuisance et de l'efficacité au combat se conjugue avec la « vulnérabilisation » de nos sociétés modernes. Les sociétés anciennes étaient souvent des fédérations d'entités sociales, des fermes-villages. Elles pouvaient vivre en autarcie ou même mourir sans trop déranger les entités voisines. Ce n'est plus le cas. Nous dépendons de manière drastique de l'intégrité de nos réseaux, que ce soit pour les vivres, l'eau, les communications, l'énergie, l'information, etc. Nos réseaux de communication, à commencer par Internet, offrent des possibilités de nuisance immenses, illustrées par le piratage informatique, totalement inimaginable en 1950.

La conjugaison de ces deux caractéristiques – augmentation des capacités individuelles de nuisance et vulnérabilités nouvelles de nos sociétés – valorise considérablement toutes les stratégies du faible au fort. Les « jacqueries » modernes et les rebellions de petites minorités ethniques peuvent ainsi se mesurer, presque à armes égales, contre ce qui reste de l'antique pouvoir « royal ».

Enfin, depuis la naissance des gazettes, vers 1750, tout pouvoir s'est révélé très sensible à l'opinion publique. C'est là une vulnérabilité nouvelle et très importante. Si la guerre, selon Clausewitz, a pour but d'obliger l'adversaire à changer de politique, alors, pour les démocrati...
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